Il était une fois… un musée pas comme les autres, précieux gardien de tous nos plus beaux souvenirs d’enfance. Depuis 1989, la petite commune jurassienne de Moirans-en-Montagne accueille un musée à l’architecture atypique, qui retrace 4 000 ans d’histoire du jeu et du jouet. Avec près de 2 000 objets exposés, de toute époque et de tous pays, le site offre à voir l’une des plus belles collections de jeux et jouets en Europe. Zoom sur un musée vivant et intergénérationnel, conçu pour séduire toute la famille !

Comment un village de 1 000 habitants au cœur du Jura a pu devenir au début XXe siècle le berceau français du jouet ? Pour répondre à cette question, il faut remonter un siècle plus tôt, alors que l’activité de tournerie et de tabletterie se délocalise de Saint-Claude pour s’étendre à de nombreuses communes du Sud Jura. La spécialité des fabricants moirantins ? Un petit sifflet surmonté d’un ballon qui produit un sifflement quand il se dégonfle. Appelé « bibi », il vaudra au village le surnom de « Bibiville ». Dès lors, Moirans-en-Montagne devient l’un des principaux centres de tournerie sur bois et la renommée de ses jouets s’étend jusqu’à en faire la capitale du jouet français.

 

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Né d’un travail artisanal, le jouet va progressivement s’industrialiser au cours du XXe siècle. Dans les années 50, l’apparition du plastique va donner une nouvelle dimension au jouet du Jura. Certaines entreprises, comme Moquin Breuil, qui deviendra Smoby, abandonnent le bois au profit de cette nouvelle matière, plus légère et plus facile à produire. Le jouet se démocratise et devient donc plus accessible : comment oublier les célèbres jouets « Bonux », ce petit cadeau contenu dans les paquets de lessive dès les années 60 ? Quelques irréductibles maintiendront cependant leur production en bois, parmi lesquels Educalux, Vilac, Jeujura ou Lorge, avec des jouets laqués très colorés, marque de fabrique du jouet en bois jurassien.

« Un gros Lego égaré sur une prairie du Haut-Jura »

En 1986, la commune de Moirans-en-Montagne et les industriels du jouet lancent l’idée d’une Maison du jouet et créent l’Association pour la tournerie et le jouet français. Présidée par Dany Breuil, directrice générale de Smoby, elle affiche son ambition de « faire revivre hier pour créer aujourd’hui le jouet de demain ». En 1989, la Maison du jouet est inaugurée. Ce « gros Lego égaré sur une prairie du Haut-Jura », comme le décrira l’architecte Guy Bonnivard, devient alors à la fois un lieu d’exposition pour les industriels locaux, mais aussi un centre de recherche. En janvier 1997, la Maison devient musée municipal et enrichit ses collections de jouets venus du monde entier. En 2002, le lieu reçoit l’appellation « Musée de France » délivrée par le ministère de la Culture aux musées français agréés par l’État et bénéficiant prioritairement de son aide.

 

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À la suite du transfert de sa gestion à la communauté de communes Jura Sud, le site ferme ses portes au public pour dix-huit mois de travaux, entre 2010 et 2012. Un chantier de rénovation titanesque qui permettra de moderniser les salles du musée, de doubler sa surface en y intégrant un « quartier de l’enfant » avec une médiathèque, une crèche, une école et un centre de loisirs. À l’architecture initiale du musée, qui a fait son identité, s’ajoutent de nouveaux espaces aux couleurs très vives, clins d’œil aux jouets du Jura. À l’extérieur, des jeux et des espaces verts côtoient un triptyque d’émail et d’acier de l’artiste Françoise Petrovitch, dont les œuvres ponctuent également les allées du musée.

Les jouets par affinités

Et pour aborder 4 000 ans d’histoire du jeu et du jouet à travers le monde, il fallait un parcours original qui permette de faire se côtoyer dans un même espace les jouets d’époques et de cultures différentes. « Le musée n’est pas organisé de manière chronologique, explique Mélanie Bessard, sa directrice. Il était difficile de présenter le musée à travers les âges sans faire l’impasse sur certaines périodes historiques. Nous avons très peu de jouets antiques, et aucun jouet du Moyen-Âge par exemple. C’est pourquoi nous avons voulu débuter la visite avec une frise chronologique qui permet de montrer l’évolution du jouet à travers les âges. C’est aussi une sorte de puzzle géant pour les plus jeunes. » C’est donc par thématique que les collections sont regroupées : « Notre parcours permet de faire se côtoyer des jouets de différentes époques, du bois au plastique par exemple. Ce côté transgénérationnel plaît beaucoup aux visiteurs, car cela génère de l’échange, notamment dans les familles, des enfants aux parents et aux grands-parents. Chacun y trouve son compte. »

 

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« On reste un musée vitrine, mais on a un public qui vient pour jouer, donc on essaye de proposer des espaces de manipulation, avec des jeux virtuels ou réels et toute une offre d’ateliers, de visites guidées, d’escape game et de chasses aux trésors pour garantir ces moments de détente. Il y a aussi plusieurs espaces de jeux dans le musée. Même les adultes parfois, on les retrouve en train de jouer à la dînette ! On reste un musée atypique, un lieu vivant, où ça court, où ça rit. » Un musée vivant mais également très animé puisque de nombreuses expositions événementielles ponctuent chaque saison. De quoi permettre à chacun de retrouver son âme d’enfant !

 

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