La cathédrale de Saint-Dié est peu connue. Pourtant, avec l’église Notre-Dame de Galilée et le cloître qui les relie, elle forme un joyau architectural, riche de styles différents, témoins de l’évolution de l’art sacré à Saint-Dié-des-Vosges et des vicissitudes de l’histoire.

Avec son escalier à double révolution, sa large façade de grès rose encadrée par d’imposantes tours carrées, la cathédrale Saint-Dié intrigue. Elle ne parait pas bien vieille, mais pourtant elle semble porter sur elle le poids des siècles.

Lorsque l’on se penche sur son histoire, les interrogations s’envolent. Tout commence en 659, avec l’arrivée de Déodat (Dié ou Dieudonné). L’homme d’origine irlandaise (à moins qu’il ne soit de Trèves), éphémère évêque de Nevers (encore que cela soit controversé) ou moine à Luxeuil avait souhaité se retirer dans la solitude. Il se serait alors mis en quête d’un endroit propice. Il le trouva dans la vallée qui se nommait le Val-de-Galilée et qui prit plus tard le nom de Val-de-Saint-Dié.

Il y bâtit d’abord, à l’endroit où se trouvait un ancien sanctuaire païen gallo-romain, un ermitage avec un petit oratoire qu’il dédia à saint Martin, puis, avec ses disciples, un monastère entre le Robache et la Meurthe, près duquel sera construit bien plus tard une ville, la future Saint-Dié.

La collégiale devenue cathédrale

Après être passé entre plusieurs mains, à partir de 1051, sous le règne de Gérard d’Alsace, les ducs de Lorraine en devinrent les seigneurs voués (protecteurs). Ils y installèrent des chanoines réguliers. L’église abbatiale devint la collégiale du chapitre. En 1777, elle fut élevée au rang de cathédrale par le pape Pie VI qui créait en même temps l’évêché de Saint-Dié.

Plusieurs fois incendiée (1065, 1155 et 1554) et reconstruite, elle est un livre ouvert sur l’art sacré à Saint-Dié-des-Vosges, mais aussi sur les vicissitudes de l’Histoire.

Ainsi la façade a été élevée, de 1711 à 1714, dans un style classique par l’architecte italien Giovan Betto. Sobre et massive, elle est rythmée par un avant-corps encadré de quatre colonnes supportant un fronton triangulaire. Sans les tours qui l’encadrent, elle a des proportions palladiennes qui semblent s’inspirer de la basilique San Giorgio Maggiore à Venise.

La nef de style roman (XIIe) est caractéristique de la Lorraine du sud. On admirera les cinquante-deux chapiteaux sculptés dans le grès des Vosges, avec leurs motifs végétaux ou leurs étranges créatures. Le plus connu est celui de la dernière colonne représentant une étrange sirène bifidée aux six poissons, munis de quarante nageoires.

Chœur, abside et transept, s’ils sont d’un gothique plus tardif, ont été construits en harmonie avec la partie romane (fin XIIIe siècle).

 

Le coup de cœur de Mitterrand

Quelques objets mobiliers sont dignes d’intérêt, tels que cet enfeu de la fin du XIIIe siècle, la statue en calcaire de la Vierge à l’Enfant, dite Notre-Dame de Galilée, une des madones lorraines les plus célèbres (vers 1320), le tombeau gothique du chanoine, chantre de la collégiale de Saint-Dié, Burnequin de Parroye (1369), ou encore des copies de peintures murales du XIVe siècle. L’orgue a été réalisé par le facteur Pascal Quoirin en 2008-2009.

Les rares vitraux d’époque (XIIIe) ayant survécu sont dans une chapelle à gauche de l’entrée. Les autres sont résolument contemporains (1987) mais bien réussis. On raconte d’ailleurs ici que, lors de sa dernière visite dans les Vosges, François Mitterrand a fait le détour (et une entorse au protocole) pour les admirer. Œuvre collective (Manessier, Jean Bazaine…), ces verrières évoquent le double thème de la mort et de la résurrection. Certains y voient donc un rappel de l’histoire de la ville.

La cité, en effet, a été terriblement meurtrie pendant la Seconde Guerre mondiale. Dynamitée par les Allemands, la cathédrale a perdu l’ensemble de sa voûte. Reconstruite à l’identique, elle fut à nouveau consacrée en septembre 1974.

 

D’une église à l’autre

Il ne faut pas manquer le petit cloître qui est comme une passerelle entre la cathédrale et l’église de Notre-Dame de Galilée.

Ce très bel ensemble gothique des XVe et XVIe siècles aux élégantes baies en arc brisé de style flamboyant et aux amusantes gargouilles, mais qui reste inachevé en raison d’un incendie malencontreusement allumé en 1554 par des chanoines tirant à l’arquebuse. 134 maisons furent détruites ainsi que la toiture des deux églises.

Notre-Dame de Galilée, appelée aussi la « petite église », a été construite au XIIe siècle à la suite d’un incendie détruisant les précédentes églises élevées aux VIIe et VIIIe siècles. Le 6 juillet 1554, un autre feu a endommagé sa couverture et provoqué l’effondrement du sommet de la tour du clocher. En 1697, une communication entre le cloître (galerie Nord) et le parvis de l’église Notre-Dame de Galilée a été créée. Aujourd’hui, elle est considérée comme l’un des exemples remarquables de l’art roman lorrain du Sud.