Au crépuscule, les amoureux de nature sauvage ont pris position, sans un bruit, pas même un soupir, le long d’une clairière. La température est douce, le soleil descend, chacun perçoit les petits sons de la nature : vol de libellule, canard qui cancane, vent dans le feuillage… Jusqu’au premier cri, celui que tous attendaient, et qui dessine un sourire sur le visage des participants occupés, jumelles en main, à tenter d’apercevoir l’animal à l’origine de ce hurlement. C’est pour cela que nous sommes venus, pour écouter le fameux « brame du cerf » qui résonne en cette période dans les forêts vosgiennes, notamment celle de Gérardmer, et observer le cerf en question si possible. Car le cerf est le seul animal qui brame, et cela seulement durant la phase de reproduction, du 15 septembre (environ) jusqu’à la mi-octobre, novembre pour les plus tardifs.
Ce n’est pas pour appeler la biche, comme on pourrait le croire, que le majestueux cervidé brame, car la femelle, qui aboie comme un chien pour prévenir d’un danger, ne partage pas ce moyen de communication avec le mâle. Le brame est plutôt pour le cerf un exutoire de tensions, une façon de se juger, de se jauger, d’exprimer la présence, le désir, la menace, la possession.
Il en existe d’ailleurs quatre différents : le brame de présence, le brame de défi, le brame avant et pendant la saillie et le brame de victoire après un combat. C’est dans les espaces ouverts, calmes, peu fréquentés que l’on a une chance d’entendre le mâle bramer. Là où les biches peuvent se placer sous la surveillance du cerf, animal polygame dont la harde peut compter jusqu’à une trentaine de femelles. Une activité à temps plein qui l’empêche de se nourrir : durant le brame, le cerf peut perdre une trentaine de kilos !