En juillet 1875, le « comité des promenades » y est créé. Il est l’ancêtre des offices de tourisme. Depuis, la cité cultive toujours son image et son art de vivre.

À étudier l’histoire de Gérardmer, on comprend vite pourquoi le premier office de tourisme de France y a été créé en 1875. De tout temps, les rives de son lac ont attiré. La légende ne raconte-t-elle pas, en effet, que Charlemagne serait venu chasser le loup et le cerf dans les généreuses forêts gérômoises ? Le long de la Vologne, on retrouve d’ailleurs la pierre de Charlemagne où il se serait reposé.

Une autre légende raconte que l’empereur à la barbe fleurie aurait pêché à Longemer un brochet si majestueux qu’il l’aurait remis à l’eau non sans l’avoir auparavant muni de clochettes d’or. À ce jour, les passionnés de la gaule cherchent toujours à prendre ce fameux poisson !

 

 

Le fils du grand Charles, Louis le Pieux, y est aussi venu se distraire, tout comme, plus tard, le premier duc héréditaire de Lorraine, Gérard d’Alsace (1048-1070) qui y aurait construit une tour (relais de chasse ou tour de défense ?) vers 1056. Encore que le conditionnel reste de rigueur. Si la tradition populaire lui attribue la fondation de la ville qui aurait alors pris son nom, des historiens aujourd’hui battent en brèche cette théorie.

Contrairement à ce que laisse supposer la graphie actuelle, selon eux, il ne s’agit pas de Gérard mais de Géraud (ou Giraud), forme issue du germanique Gerwald, alors que Gérard vient de Gerhard. En effet, la première forme écrite n’est attestée que dans des documents écrits officiels en 1285, dans un acte du duc Ferry III de Lorraine créant une « ville neuve » sur le territoire des « lieux-dits de Géramer et Longe-mer ».

 

 

Non de nom !

À ce propos, réglons un malentendu qui persiste : il faut prononcer « gérarmé » et non « gérarmère », si l’on ne veut pas passer pour un touriste inculte. Pour comprendre, il faut regarder du côté de l’étymologie. En effet, en patois, signifie « mer », et moué signifie « maison avec grand jardin » (mansus en latin tardif, mas en langue d’oc, meix en langue d’oil, et moué en patois du pays vosgien). Ainsi, les habitants de la vallée, lorsqu’ils désignent les lacs du secteur, prononcent Longemô pour Longemer, le lac étant tout en longueur, R’tôn mô pour Retournemer car étant situé dans un cul-de-sac, pour revenir dans la vallée, il faut faire demi-tour, (on « retourne ») et Girômoué pour Gérardmer.

La dernière syllabe fait donc bien allusion au lac (la mer) dans les deux premiers cas, mais pas dans le troisième. Il s’agit ici d’un grand jardin au sens large, c’est-à-dire un domaine, ou tout au moins une grande maison avec dépendances, jardin, prés et bois. Ainsi, le lac de Gérardmer se dit « lè mô d’Girômoué » et non « Girômô ».

Quoi qu’il en soit, au XVIIe siècle, les ducs de Lorraine et les chanoinesses de Remiremont s’y sont rendus à leur tour pour se reposer. Bien plus tard, vers 1850, canots privés et baigneurs commencèrent à s’y prélasser. En juillet 1875, le « comité des promenades » fut créé. Il est l’ancêtre des offices de tourisme.

Bref, de tout temps, l’homme a aimé venir s’y ressourcer… même si la cité a eu son lot de souffrances, comme en 1633, lors du passage des armées françaises et suédoises. Ou pendant ces neuf années au cours desquelles la peste et la famine anéantirent les deux tiers de la population.

 

 

Abel Hugo et la perle des Vosges

Une ère nouvelle débuta avec le chemin de fer. Le 10 juillet 1878, le premier train arriva à Gérardmer sur une ligne financée en partie par des industriels locaux. La « Perle des Vosges », surnom donné à la cité par Abel Hugo, frère de Victor, dans un de ses récits datant de 1835, La France pittoresque, attirait désormais non plus seulement les bourgeois fortunés de Lorraine, mais également les Parisiens. Les rives du lac commencèrent à s’aménager avec les hôtels et les villas, propriétés de riches industriels et de notables belges, nancéiens parisiens.

En 1893, Auguste Gaspard, le premier batelier du lac, décida d’exploiter son ponton en louant des barques aux visiteurs. Le bateau à vapeur L’Armande (1897) et la barque à moteur L’Éclair (1902) sillonnèrent bientôt les eaux. Un des premiers touristes, M. Chanony, qui « était privé de son bras droit et néanmoins expert en toutes sortes de travaux manuels », inventa un engin révolutionnaire : le bateau à pédales !