De Migennes à Saint-Jean-de-Losne, de l’Yonne à la Saône, le canal de Bourgogne franchit la ligne de partage des eaux entre l’Atlantique et la Méditerranée. L’idée de rejoindre les deux mers remonte aux Romains. Il faudra toutefois attendre 1775, et un édit du roi Louis XVI, pour que l’ouverture du canal soit ordonnée… et 1832, sous Louis-Philippe, pour que l’ouvrage soit enfin inauguré. Quelques années plus tard, au milieu du XIXe siècle, ce tour de force, véritable exploit technique, chef d’œuvre du génie civil, atteint son apogée ; c’est alors l’axe de communication principal entre le nord et le sud du pays. La ville de Paris était alors largement alimentée par cette voie, le long de laquelle nombre de matières premières étaient transformées dans des usines : bois, houille, fer, plâtre, ciment, vin, betterave, céréales, etc.
Sur les chemins de halage, aujourd’hui plébiscités par les piétons en short-baskets et les cyclistes, ce sont longtemps les hommes qui ont tiré les bateaux (parfois chargés jusqu’à 25 tonnes !), puis les chevaux, les vaches, les tracteurs, avant que les embarcations ne soient munies d’un moteur. Une lente avancée qui va stopper net, dès lors que le chemin de fer aura été inventé. Le ferroviaire et le routier vont signer le déclin du transport par voie d’eau. Celui des marchandises tout du moins, car l’avènement du tourisme fluvial, à l’orée des années 1980, va relancer la fréquentation du canal et voir le retour des péniches.
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En cours de route, un grand nombre de petits ou grands trésors de Bourgogne se laissent découvrir. Parfois, quelques coups de pédale suffisent pour les rejoindre. À Montbard, l’abbaye de Fontenay, fondée en 1118 par Saint Bernard de Clairvaux, est la plus ancienne abbaye cistercienne conservée au monde. Classée monument historique français dès 1862, inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco en 1981, c’est l’un des premiers monuments français à figurer sur cette liste. À Montbard toujours, le musée Buffon propose un parcours à travers l’histoire des sciences, des cabinets de curiosité aux premiers muséums, en s’attachant à Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon (1707-1788), et Louis Jean-Marie Daubenton (1716 -1800), tous deux natifs de la localité. Le parc Buffon, aménagé au XVIIIe siècle par cet homme des Lumières qu’était Buffon, mérite lui aussi la visite, tout comme la grande forge de Buffon, située près de Montbard… à Buffon (un nom décidément incontournable !).
Les amoureux des châteaux se rendront vers celui de Bussy-Rabutin, remarquable pour son architecture, pour l’histoire de son plus célèbre propriétaire – le comte Roger de Bussy-Rabutin (1618-1693), cousin de Madame de Sévigné, chassé de la cour pour avoir dévoilé les galanteries des grands de son temps –, et pour son jardin remarquable, restauré en 1990 dans un esprit très XVIIe-XVIIIe. Ils pourront rejoindre le château de Commarin, l’un des rares châteaux de France à n’avoir jamais été vendu, ni pillé pendant la Révolution française, et dans les mains de la même famille depuis plus de 900 ans. Le MuséoParc Alésia est lui aussi à deux pas du canal, tandis que les curieux seront irrésistiblement attirés par les villages médiévaux – Semur-en-Auxois, Flavigny-sur-Ozerain, Châteauneuf-en-Auxois (l’un des « plus beaux villages de France ») –, situés dans les environs… Décidément, suivre le canal de Bourgogne promet de voyager aussi bien dans l’espace que dans le temps !
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